Botanique 98
Si vents et pluies nous ont privés
Des couleurs d'un bel automne,
Le plaisir de nous retrouver
Éclaircit ce temps monotone.
Encore une année qui s'achève,
Que je tente de résumer
Et c'est ma façon d'être brève,
Si j'essaie de vous la rythmer....
Aux Trois Pignons, en Février,
Nous aurions aimé retrouver
Nos troncs d'arbres tout tapissés
De lichens riches et variés!
Hélas, Françoise eut beau scruter,
Nos Parmélias de l'an passé
Etaient tout ratatinés!
L'hiver sec en était la cause;
Mais, nous avons vu autre chose :
En sous-bois, dans les bruyères,
Quantité de Cladonias :
Gracilis , Floerkaena,
Uncialis , Coccifera...
Sur les rochers de la platière,
S'étalaient de curieux nombrils :
Des pustuleux et d'autres gris :
Toute la famille Ombilicaire !
Le quinzième jour de Février,
C'était : " La forêt en hiver ".
La floraison des Noisetiers
N'a pas échappé à Pierre
Et sa loupe nous a révélé
Le rose intense des fleurs femelles
Offertes aux pollens envolés...
La vie continue sous le gel !
Un chêne était dans la brume :
Monsieur Konrat nous a parlé
De ce qu'on peut lire sur les grumes :
Ecorce, Liber, Cambium, Aubier ;
Le bois de cœur lignifié
Permet à l'arbre de résister
Aux vents violents de mille hivers,
Mais pas aux haches des forestiers
Pressés de le vendre aux enchères !
Etangs de sait Hubert, le 3 Mai.
Nous étions bien peu ce jour là !
Mais c'est pour nous que fleurissait
Le bel Orchis Mascula !
Pour nous, l'Yvette et ses marais,
Cassissiers, Groseilliers sauvages,
Que Lathrée clandestine se montrait
Et que dans l'eau se reflétaient
Lamiers jaunes et Populages.
La Bièvre ne vous a guère attirés :
Nous étions peu nombreux le 10 Mai
Pour écouter Danielle Thévenet
Qui, pour nous, avait recherché
Dans les archives, le tracé
De l'ancien lit de la rivière;
Elle nous a conté que naguère,
Tisserands et teinturiers
Etalaient sur les prés verts
Les toiles de Jouy imprimées.
Elle nous a conduits sous le chêne
Où s'installait le Roi Soleil,
Pour superviser les travaux
D'un aqueduc sans pareil,
Qui devait acheminer l'eau
Et irriguer son grand domaine.
A Maudétour, dans le Vexin,
Les Lychnis s'ébouriffaient,
Le Muguet gardait quelques bris,
La Petite Douve jaunissait
En lisière d'une tourbière
s'épanouissaient les Platanthères,
( Orchidées blanches, lavées de vert ).
Mais la plus belle floraison
Qu'ai pu nous offrir la saison,
Ce fut, dans l'après-midi,
Du côté de Vienne-en-Arthies :
Orchis pourpres, fringants Militaires
Et des hampes de Céphalanthères,
Où l'on découvre que chaque fleur
D'un blanc crème, fait grand mystère
Du jaune d'or de son cœur.
On nous vit au bois de Morval,
Equipés d'appareils photos,
Rechercher l'angle idéal
Pour un Iris au bord de l'eau !
C'est justement ce jour là,
Qu'un naturaliste ami,
Est venu rechercher par là,
Quelque vipère endormie...
Et nous voilà " Grands Reporters "
Mitraillant les contorsions
De cette pauvre vipère,
Suspendue au bout d'un bâton !
Partis de la route des crêtes,
Suivant des chemins forestiers,
Avant d'arriver à l'Epte,
Nous avons pu inventorier
Les friches des pentes ensoleillées :
Une station de petits Cocristes,
L'Orobanche Pourpre sur Achillée...
Sans vous énumérer la liste
De toutes les curiosités,
Il faut pourtant que je signale
Que, par hasard, quelqu'un trouva
L'étonnante mue d'une cigale,
A côté des Gymnadénias !
A Fourges, auprès du moulin,
Nous avons pris notre repas,
Puis nous sommes restés quelques-uns
Volontaires pour l'Arboretum;
Ce fut un bon choix en somme,
Car notre dessert était là,
Digne d'une table de Roi :
Par milliers : des fraises des bois !
Pour la forêt de Ferrières,
Où je n'ai pas pu aller,
Vous demanderez à Pierre
De vous en faire le résumé...
L'Isle-Adam, le 21 Juillet :
Suivant à la queue leu leu
Les botanistes parisiens
Qui sont toujours aussi nombreux,
Nous nous sommes immergés
Dans une jungle de Carex.
L'exercice était complexe,
Monsieur Duhamel, Pierre Bonin,
Nous énonçaient des noms latins;
Nous sommes souvent restés perplexes
Ne sachant les orthographier !
Qu'avez-vous vu à Rambouillet ?
Je vous ai faussé compagnie,
A la fin du mois de Juillet,
Pour le stage d'astronomie.
Le ciel de Haute-Provence
Est tout étoffé, la nuit;
Dans une chaleureuse ambiance,
La tête en l'air, on s'initie :
Nous sommes, le soir, astronomes
Et botanistes dans la journée,
Le jour est pour la Cupidone,
La nuit aux objets de Messier.
Tout devient mystère, le soir
Et les lumières reflétées
Ont pour effet de contraster
La profondeur des trous noirs.
Tout est rire, sous le soleil,
Parmi les fleurs de Salagon
Et les ocres nous émerveillent,
Dans les carrières du Lubéron.
Trop court séjour ! Je le regrette !
Merci, Robert et les amis,
De m'avoir conviée à la fête
Que se donnent le jour et la nuit.
Début de Septembre ? Assez beau.
Nous avons pu herboriser
Et grappiller sur les coteaux,
Les baies rouges des Cornouillers.
Fin septembre, restaient accrochées
Quelques mûres bleues sur les Ronciers
Qui bordaient la forêt de Coye;
Mais, plus de fleurs en sous-bois...
Restaient çà et là, en lisière,
Quelques touffes d'Ibéris Amère.
La forêt de Carnelle était nue,
Pour mieux nous montrer ses Charmes
Seuls les Hêtres étaient vêtus,
D'un feuillage couleur de flamme !
Que voulez-vous, maintenant,
A l'approche de l'hiver,
Le très grand charme d'Adam
Se cache sous le pull-over !
Excusez cette espièglerie
Que m'inspirent les enseignements
De nos Maîtres érudits,
Que je salue joyeusement !
Mireille Grimont 1998